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De la fille que j’étais à celle que je pourrais élever

  • Photo du rédacteur: acopodcasts
    acopodcasts
  • 25 juin
  • 6 min de lecture

Ces derniers temps, plus que d’habitude, je questionne beaucoup mon envie d’être mère.


J’ai grandi dans une famille nucléaire, tout ce qu’il y a de plus basique, et pendant longtemps, c’était évident que c’était aussi ce que je voulais. Comme maman, me marier très jeune et construire une belle et grande famille de laquelle je m’occuperais, parce qu’en tant que femme, on te met dans la tête que la maternité n’est pas un choix, mais un devoir, quelque chose que tu te dois de faire.


Puis j’ai grandi, je me suis déconstruite et j’ai réalisé que cette envie de maternité que je pensais innée, n’était en fait qu’une construction sociale de laquelle je devais me défaire.


Les questions ont commencé à fuser dans ma tête : est-ce que je suis assez égoïste pour faire naître un enfant dans le monde dans lequel on vit ? Est-ce que j’ai envie que mon corps passe par tous ces changements ? Est-ce que je suis capable d’élever un autre être humain correctement ? Est-ce que j’ai même envie de dédier ma vie à l’éducation d’un autre être humain ? etc...


Plus le temps passe, moins je vois la maternité comme quelque chose dont j’ai vraiment envie. Je me demande si « ça viendra avec le temps », si un jour je me lèverai et que j’aurai l’envie irrépressible de devenir mère, parce que sans mentir, aujourd’hui, on en est loin.


Alors que je vois la quasi-totalité de mes copines parler de leur future progéniture, me montrer la liste des prénoms qu’elles aimeraient leur donner, fondre devant des vidéos de bébés, moi, cette « baby fever » je ne l’ai pas.


À la question « quand est-ce que tu aimerais avoir des enfants ? » ma réponse est toujours « je ne sais même pas si j’en veux… », parce que c'est bien connu que le seul rêve d’une femme de 24 ans, c'est d'avoir des petits marmots.


Mais, il y a quelques semaines, je suis tombée sur une photo de moi petite, j’ai repensé à tout ce que j’ai vécu, j’en ai eu les larmes aux yeux, parce que la petite fille que je voyais à l’écran voulait juste qu’on l’aime pour ce qu’elle était. Oui, elle méritait mieux, beaucoup mieux.


J’ai repensé à la manière dont j’ai été éduquée, la manière dont on m’a aimée, ou en tout cas, essayé de m’aimer.

Et, sans même m’en rendre compte, je me suis imaginée éduquer une petite fille, lui donnant tout ce qu’on ne m’avait pas donné à moi, l’éduquant de la manière dont j’aurais moi, aimé être éduquée : avec amour, bienveillance, tolérance, respect et complicité.


Avec cette enfant imaginaire, je me suis vue être complice, rire avec elle, parler, pour de vrai, avec elle, lui transmettre tout ce que je savais et tout ce que je pensais être juste pour elle.

Tout d’un coup, très égoïstement peut-être, le temps de quelques minutes, j’ai ressenti la profonde envie d’être la mère d’une fille, qui n’existera peut-être jamais, juste pour faire mieux que ce qu’on a fait avec moi, la théorie étant toujours plus simple que la pratique.


A cette enfant qui n’existe que dans mon imaginaire, j’ai eu envie de lui dire plein de choses.


Et parce que je ne sais pas si elle existera un jour, j’ai eu envie de faire ce que je sais faire de mieux : lui écrire, lui dire tout ce que j’ai envie qu’on soit – potentiellement – toutes les deux, tout ce que j’ai envie de lui transmettre.

Au pire, ça servira à quelqu’un d’autre, au mieux, elle pourra le lire un jour, et je trouve ça plutôt cool :


À ma (potentielle) fille,


J’ai grandi avec la ferme croyance qu’on ne m’aimait pas, que je n’étais pas assez bien pour mériter de l’amour.

Mais toi, je veux que tu saches et que tu grandisses avec la certitude que, quoi que tu fasses, qui que tu décides d’être, mon amour pour toi sera inconditionnel. L’amour, surtout celui d’une mère, n’est pas quelque chose à gagner, et j’espère que tu te lèveras tous les matins en sachant que moi, ta mère, je t’aime.

Sans doutes.

Sans conditions.

Sans « si ».


Le monde est cruel. Cruel envers les femmes. Et encore plus envers les femmes noires.

J’espère t’apprendre que ton existence compte, autant que celle des autres. Que tu n’as pas à t’excuser d’être celle que tu es.


Qu’il y a autant de manières d’être une femme noire qu’il y a de femmes noires, et que chacune de ces manières est légitime. La tienne aussi.


Tu as le droit de rêver (très) grand. Tu ne seras jamais « trop ambitieuse » ou « irréaliste », que ça prenne la forme d’un projet, d’un métier, d’un engagement ou d’un mode de vie, ton ambition a le droit d'exister.

Tu peux être tout ce que tu veux. Et si le monde te dit que tu n’as pas ta place, fais-toi une place. Et prends-la.


Viendra un moment où ton corps deviendra un sujet de discussion. Pour les autres. Pour la société. Et surtout… pour toi.

Tu te demanderas s’il est "assez bien", tu te demanderas s’il faut changer ci, ou ça. Tu commenceras peut-être à le regarder avec doute, avec exigence, avec ce regard dur qu’on apprend trop tôt à porter sur soi.

À ce moment-là, sache que je serai toujours là pour te rappeler à quel point tu es belle.


Pas « belle » avec 10 kilos en plus ou en moins, pas « belle » malgré ceci ou cela. Juste belle, exactement comme tu es.

J’espère t’apprendre à te regarder dans le miroir avec amour, douceur et compassion, parce que tu mérites de t’aimer dans toutes tes phases, dans toutes tes formes, pour tout ce que tu es.


Et les jours où tu n’y arriveras pas, les jours où tu ne t’aimeras pas, où tu te sentiras de trop, pas assez ou complètement à côté, sache que moi, je t’aimerai quand même. Entièrement.


Toujours sans aucune condition. Je t’aimerai les jours où tu brilleras, mais je t’aimerai encore plus fort les jours où tu douteras, parce que ton amour-propre vacillera parfois, c’est humain. Mais le mien pour toi, lui, sera inébranlable et ne bougera jamais.


Ma (potentielle) fille, tu vas malheureusement vite comprendre que la vie est semée d’embûches et qu’on fait tou·te·s des erreurs.

Quand ce sera le cas pour toi, je veux que tu saches que je serai toujours là, pour te prendre dans mes bras, pour t’écouter sans te juger et pour te rappeler que tomber ne fait pas de toi une mauvaise personne.


Que tu as le droit de te tromper, d’essayer, de recommencer, de changer d’avis. Je veux que tu saches que tu n’auras jamais à mériter mon pardon, quoi que tu décides de faire. Que je serai toujours fière de toi, qui que tu veuilles être, peu importe les erreurs que tu fais.


Tu as le droit de ressentir. Fort.

Tu as le droit d’être triste, en colère, bouleversée, sensible, fragile, de pleurer, et tu n’as pas à t’en excuser. Tu n’as pas besoin d’être parfaite, constante ou toujours souriante pour mériter d’être entendue.

Je veux que tu apprennes à accueillir tes émotions, pas à les fuir. Elles font partie de toi, elles te parlent, et elles comptent.

Et je te le promets : jamais tu ne seras “trop” pour moi.


J’espère que tu te sentiras toujours en sécurité avec moi, assez en confiance pour parler de tout ce qui te touche, de ton/ta premier·e amoureux·se à ton premier chagrin d’amour.

De tes difficultés à l’école à tes disputes avec tes ami·e·s, de tes envies à tes peurs, de tes rêves à tes désillusions.


J’espère que tu sauras que tu peux tout me dire, que tu te sentiras vraiment à la maison avec moi, chez toi.

Un « chez toi » qui n’a pas besoin de murs pour exister.

Un « chez toi » qui tient dans un regard, dans une main tendue, dans un “je suis là”.


Ma fille, tu n’es pas là, et peut-être même que tu ne le seras jamais.

Mais si un jour, j’ai la chance de te tenir dans mes bras, ce sera pour te donner le monde, et bien plus.

 
 
 

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