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Notes sur la nostalgie

  • Photo du rédacteur: acopodcasts
    acopodcasts
  • 25 août
  • 4 min de lecture


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Quand je pense à l’été, je pense immédiatement à mes vacances à Dakar.

Tu sais, les vacances avec tous ses cousins, à dormir tous.tes ensemble sur des matelas dans le salon de mamie parce qu’on ne veut pas se lâcher une seule seconde. Les vacances à faire les 400 coups, à rire, à s’embrouiller aussi (mais jamais trop longtemps) et à faire des nuits blanches parce qu’on a trop de choses à se dire, trop de choses à faire. Les moments qui nous font oublier que le temps existe et qu’on devra, tôt ou tard, se dire au revoir ?

Ce sont ces images qui me viennent en tête à chaque fois que le mois de juin arrive et qu’on me demande ce que j’ai prévu pour l’été.


Ma mère a toujours accordé une grande importance à la famille, et au fait qu’on garde un lien avec nos racines sénégalaises. Et donc, chaque été, quand tout le reste de mes camarades faisait des plans pour parcourir le monde, j’espérais en secret que mes parents, comme chaque année, avaient prévu de nous emmener passer tout l’été à Dakar, et que c’était pareil pour mes oncles et mes tantes avec leurs enfants, nos cousins.

J’espérais qu’on se retrouve tous.tes pour passer un été, encore une fois, inoubliable.


On ne se parlait pas beaucoup de l’année, mais dès qu’on se retrouvait à plus de 10 dans la maison de ma grand-mère, c’était comme si on ne s’était jamais quittés, comme si une année ne s’était jamais écoulée.


Et c’était parti pour nous raconter nos vies, passer nos après-midis à la piscine olympique et nos week-ends sur la plage de N’gor, les amourettes de vacances qui prenaient beaucoup plus de place qu’on ne l’aurait pensé, les dîners interminables le soir à débriefer et programmer les prochains jours.

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Chaque été, ce sont les mêmes souvenirs qui me viennent en tête, ceux de l’insouciance de l’adolescence, des couchers de soleil sur le toit de la maison, du thieb de ma mamie qu’on mangeait tous.tes ensemble dans un grand bol sur une natte par terre, et de mes grandes tantes et oncles qui n’arrêtaient pas de nous dire à quel point on grandissait et de profiter de ces moments-là parce qu’ils passent très vite, sans savoir à quel point ils avaient raison…


Je me souviens parfaitement des dernières vacances qu’on a passées ensemble, c’était l’été 2021, et cette fois-ci, c’était à Abidjan, à ce jour mes préférées. Trois ans sans se voir, et rien n’avait bougé, en tout cas pas notre complicité, ni nos fous rires, encore moins tous les souvenirs qu’on avait. Tout d’un coup, on était redevenus des ados qui voulaient passer chacun de leurs instants collés l’un.e à l’autre, à superposer des matelas dans nos chambres pour que personne ne dorme dans son coin, à se disputer comme si on avait 12 ans, mais à s’aimer plus fort que tout.

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On a passé un mois et demi magique, un mois à se retrouver, se parler, rire, danser, sortir, boire, manger, chanter, vivre, et à aucun moment, l’un.e de nous ne s’est dit que c’était les derniers instants qu’on passerait tous.tes ensemble, qu’on allait grandir, devenir des adultes, et que ces rendez-vous qui paraissaient si évidents allaient devenir de plus en plus compliqués à organiser.


On s’était promis qu’on se reverrait l’année suivante, tous.tes ensemble pour revivre ça, et toutes les années d’après jusqu’à la fin des temps.

Mais… à la fin de cet été-là, je suis partie faire mon échange en Angleterre, mes cousins sont rentrés aux États-Unis, certains ont commencé à travailler, d’autres ont repris leurs études, ma sœur a eu son bac l’année d’après… On était éparpillé.e.s à plein d’endroits différents. On pensait à autre chose, les stages pour remplir le CV, découvrir le monde avec nos ami.e.s, les vacances en amoureux.ses… et tout d’un coup, les vacances d’été entre cousin.es chez mamie, c’était terminé !


Et c’est ça, le truc avec la nostalgie : on ne sait jamais qu’on est en train de vivre “la dernière fois” avant que ce soit déjà trop tard. La dernière fois qu’on a dormi tous.tes ensemble sur ces matelas superposés, la dernière fois qu’on dînait ensemble à refaire le monde pendant des heures, la dernière fois qu’on inventait notre « chanson de l’été », on n’a pas su le voir venir.


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Je donnerais beaucoup de choses pour pouvoir les revivre, ces étés-là. Pour m’embrouiller une énième fois avec mon frère pour savoir qui doit ranger le salon, pour serrer fort mon cousin dans mes bras quand ça n’allait pas, pour maquiller ma cousine avant de sortir.J’aimerais pouvoir rire avec eux, danser avec eux, chanter avec eux, comme si on n’avait jamais grandi, comme si on n’avait jamais changé, comme si on n’avait pas d’autres priorités.J’aurais aimé une infinité d’étés ensemble à refaire le monde.


Et aujourd’hui, quand je pense à l’été, je pense surtout à ces souvenirs-là, avec un mélange de tendresse et de pincement au cœur. Heureuse de les avoir vécus, mais toujours avec un peu de tristesse, parce que ces moments ne reviendront plus jamais, pas comme avant, pas avec la même insouciance, pas avec la même intensité.Alors peut-être qu’on ne se retrouvera plus jamais tous.tes ensemble comme avant, peut-être que nos étés ne seront plus jamais les mêmes.


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Mais quelque part au fond de moi, j’ai l’espoir qu’un jour, après avoir tracé chacun nos petits chemins, on perpétue la tradition. Que nos enfants, à leur tour, puissent goûter à ces étés magiques, tisser les mêmes liens indestructibles, connaître ces au revoirs qui font plus mal que toutes les blessures, et vivre ces quelques mois suspendus, hors du temps, chaque année, jusqu’à ce que la vie prenne le dessus… et ressentir, eux aussi, cette nostalgie, de ce qui n’est plus, mais qui a quand même magnifiquement existé.


Je n’aurai peut-être plus jamais droit à mes vacances d’été à Dakar avec tous mes cousins, à cette insouciance, à ces moments inoubliables.Mais au fond de moi, je sais que, quelque part, dans chaque coucher de soleil, chaque fou rire, chaque odeur de thieb, il y aura toujours un bout de Dakar, un bout de nous, un bout de mon adolescence.

 
 
 

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